Avatar : Reprenons la Terre !
Une recension d'Avatar par John Lash Traduction de Dominique Guillet
Introduction
En tant qu’auteur d’un site qui se consacre à enseigner l’histoire de la Terre, du point de vue de la Terre, je suis heureux de déclarer qu’Avatar est le premier chef d’oeuvre d’un nouveau genre, à savoir d'une science-fiction Gaïenne, Gi-Fi. Pour une fois, Hollywood nous a gratifiés d’un film épique qui reflète les merveilles et la magie de notre monde, plutôt que le leurre d’autres mondes dans des univers lointains. On peut considérer Pandora, la planète exotique sur laquelle l’histoire se déploie, comme un monde parallèle au nôtre. Ecologiquement, c’est un univers de biodiversité spectaculaire et d’invention naturelle quasi magique, comme le nôtre. Métaphoriquement, c’est la Terre perçue comme la scène d’une bataille entre les peuples Indigènes et les prédateurs du complexe militaro-industriel. Mythiquement et esthétiquement, ce film se positionne à des années-lumière de la “Trilogie Matrix”, de “Rencontres de la quatrième dimension” et de “StarWars” : Avatar nous offre une éco-parabole, une éco-allégorie, qui puisse nous guider en ce 21ème siècle. C’est le prologue de la reconnaissance popularisée de la Déesse de Sagesse et de son histoire, de la vision Sophianique des Mystères.
"Ce qui est ici est là-bas, ce qui n’est pas ici n’est nulle part”, selon un aphorisme Tantrique. Avatar dépeint un monde étranger, Pandora, mais ce monde étranger évoque clairement la Terre dans la splendeur originelle de sa beauté Edénique. Le scénario conte l’histoire d’un peuple Indigène qui triomphe de la violence et de l’avidité qui menacent de transformer leur paradis natif en un lieu de dévastation. Cela ne nous rappelle-t-il pas quelque chose ?
Neytiri enseignant à Jake la maîtrise de l'arc
Avatar est une histoire populaire planétaire inspirée du “Voyage du Héros” tel qu’établi par le mythologiste Joseph Campbell (“Le Héros aux mille et un visages”) et Jean Houston (“The Goddess and the Hero”). Dans ma contribution personnelle à ce genre littéraire, “The Hero : Manhood and Power”, je souligne que c'est la maîtrise de la superfluidité, l'excès de pouvoir, qui fait d'un homme un héros. Il a besoin de cet excès car il bataille contre des forces écrasantes. Dans la lutte héroïque, les chances ne sont jamais égales. Un héros tel que David fait toujours face à une super-puissance monstrueuse telle que Goliath. Ce qui fait de l'homme, le mâle, un héros, c'est le recours à son excès de pouvoir afin de vaincre des forces encore plus excessives. Ce motif est présent dans tout ouvrage ou tout film fondé sur le thème du héros.
Le film de Cameron a recours à ce thème mais avec une variante fondamentale : l'addition d'une héroïne, Neytiri, qui permet au héros, Jake Sully, d'accomplir sa mission. Cameron, qui a écrit le script de son film, ajoute trois éléments au scénario classique du “Voyage du Héros”. Traditionnellement, le héros est un être solitaire et il doit vaincre, de par lui-même, les pouvoirs écrasants qui l'assaillent. Dans le film, Sully reçoit un soutien et une aide de trois sources : l'héroïne Neytiri, les Na'vi, la tribu Indigène à laquelle elle appartient, et l'Esprit-Mère de Pandora, Eywa. Jake Sully n'est pas le seul héros de la planète qu'il défend contre les prédateurs militaro-industriels et le scénario d'Avatar transcende donc les limites conventionnelles de ce mythème.
Neytiri éduque Sully aux voies de Pandora et de cette relation émerge une romance interspécifique. Les Na'vi finissent par l'accepter, non pas comme leur messie et leur sauveur, mais comme la réincarnation d'un héros guerrier, un des cinq membres uniques de la tribu qui aient jamais chevauché un dragon volant féroce, un Toruk. Ainsi reconnu, Jake rallie toutes les tribus de Pandora pour lutter contre la puissance accablante des prédateurs militaro-industriels. Finalement, au moment décisif durant lequel les natifs bataillent avec des arcs et des flèches contre les bombes incendiaires et contre des engins de guerre ultra-sophistiqués, Eywa intervient : elle envoie la furie déchaînée des animaux de la forêt à l'encontre de ceux qui, poussés par l'appât du pouvoir et du profit, veulent profaner son corps planétaire.
Avatar décrit une race Indigène de shamans chasseurs-cueilleurs, les Na’vi à la peau bleue. Ce peuple natif vit en profonde symbiose avec l’écologie de son habitat sur une planète appelée Pandora - le nom d’une déesse Grecque, la source de tous les dons (en grec ancien / Pandora, “tous les dons”). Cameron présente, avec Pandora, une métaphore cinématographique de la Terre Mère, ainsi que les Terriens d’antan l’appelaient avec charme. L'animisme, le paradigme collectif le plus ancien qui soit connu de notre espèce, affirme que cette planète, qui donne tout ce qui est nécessaire à la vie, n’est pas un globe matériel inconscient et stupide. Elle est intelligente, auto-poétique et elle interagit (elle est connectée de façon intime) avec les créatures dans son atmosphère, tant humaines que non-humaines. La moderne Théorie Gaïa affirme, de même, que la biosphère de la Terre s'auto-régule par des boucles de rétro-actions permanentes.
Tout comme Gaïa, Pandora est un supra-organisme conscient et sensible dont les Na’vi nomment Eywa l’intelligence qui y demeure - Sophia sous un autre nom. Sophia (Sagesse) étant le nom dans les Mystères pour la présence divine de la planète, Celle qui est la très sage Mère Nature, la sagesse de la Terre Vivante.
Bien qu’il soit fait recours à l’imagerie générée par ordinateur (CGI) pour dépeindre Pandora, la beauté étonnante de cette animation évoque ce à quoi puisse ressembler le monde sous le regard Edénique de l’imagination. La technologie ne peut pas générer ce regard, ou en offrir un substitut, mais lorsqu’elle est maîtrisée avec une virtuosité artistique accomplie, ainsi que Cameron l’a fait, elle peut tout simplement propulser le mental au seuil de son propre potentiel visionnaire.
Les Na’vi pratiquent la connexion avec les plantes, les oiseaux et les animaux afin de demeurer en harmonie avec Eywa, la déesse similaire à Gaïa dont la présence imprègne Pandora au travers d'un réseau de vrilles arborescentes. Les Na’vi peuvent se relier à n’importe quelle plante, ou n’importe quel animal, grâce à ce que l’on pourrait appeler une empathie shamanique. La participation dans l’histoire de vie de Gaïa-Sophia implique également un acte de relation ou de connexion. C’est une chose que de connaître et d’aimer l’histoire de la Déesse Déchue, bien sûr, et une chose essentielle. Mais, c’en est une toute autre que de vivre cette histoire au travers d’une connexion consciente avec la présence vivante de l’esprit planétaire. L’imagerie, générée par ordinateur, d’Avatar déploie un monde d’une magnificence et d’une beauté merveilleuses tout comme ce monde, qui est le nôtre, paraîtrait dans l’exaltation de cette connexion réellement vécue.
Le film résonne avec le désir, reposant en de nombreux coeurs humains, d’être vivant dans le Rêve de Gaïa, avec elle, et de découvrir notre rôle authentique dans la symbiose de la trame planétaire.
"Gaia in Chaos," peinture originale d'Ed Fisher
Le Culte de la NatureDepuis sa parution en Décembre 2009, Avatar a suscité des réactions favorables, et même très élogieuses, mais aussi de nombreux commentaires hostiles. Le gang du Vatican et les Chrétiens intégristes sont particulièrement exacerbés par la vision Pandorienne. C’est un tollé à l’encontre du Paganisme, de la religion Gaïenne, de la Wicca et du culte de la Nature qui se fait entendre sur toute la planète. La principale objection, invoquée par les Christophiles, est que nous ne pouvons pas trouver de salut dans le monde naturel mais seulement au travers du messie surnaturel. A cela, je répliquerai que si nous vivons réellement en harmonie avec le monde naturel, alors nous n’avons fondamentalement nul besoin de rédemption. Cette réponse est à la base de l’argumentation, dans mon ouvrage “Pas en son Image”, par laquelle je retrace les racines du terrorisme global au “virus salvationniste” de la foi Judéo-Chrétienne-Islamique dans un rédempteur divin.
La vision selon laquelle vivre harmonieusement et intelligemment dans une connexion intime et interactive avec la nature, comme le font les Na’vi, élimine le besoin de rédemption par un dieu paternel extra-terrestre n’est pas de mon fait, ce n’est pas une excentricité personnelle : c’est la vision intrinsèquement Païenne de la vie. C’est également la vision des intellectuels hérétiques, ceux qui choisissent de penser autrement que les croyants aveugles. “Hérésie” vient d’un terme Grec signifiant simplement “choisir, avoir le choix”.
Le Christianisme est rarement choisi par ceux qui l’embrassent. Il accéda historiquement au pouvoir par l’extermination brutale des peuples Indigènes de l’Europe, c’est à dire des Païens. Dans mon ouvrage “Pas en son Image”, je compare ce massacre au génocide intégral et à la “conversion” des Amérindiens par les colonisateurs Européens. Avatar ne tente aucunement de décrire la conversion des natifs à une idéologie religieuse de paternalisme divin, juste de les soudoyer avec des t-shirts et des paquets de bière. Les envahisseurs de Pandora ne proclament aucune idéologie religieuse triomphante : ce ne sont que de purs prédateurs militaro-industriels en quête d’un minérai rare. Cependant, une étude attentive de l’histoire moderne démontre que les entreprises et les strates militaires, de l’Armée US aux Chevaliers de Malte, exaltent le paternalisme divin et s’octroient la présence de Dieu à leurs côtés.
Le Christianisme est complice du viol et de la spoliation de la Terre et du massacre des peuples Indigènes tout autant de nos jours que de par le passé. Tant bien même la religion des perpétrateurs ne figure pas dans le scénario d’Avatar et n’intéressa pas l’auteur-réalisateur Cameron, elle constitue clairement une problématique gigantesque pour de nombreux spectateurs. Les Chrétiens conservateurs sont particulièrement irrités par l’idéalisation perçue des peuples premiers, des sauvages avec des arcs et des flèches qui pratiquent des rites shamaniques et qui se connectent avec des animaux, même après les avoir tués. Les commentaires hostiles, et les attaques rangées, à l'encontre d'Avatar donnent aux croyants authentiques, en Dieu et au Christ, une occasion de vider leur bile et de révéler, une fois encore, combien ils sont emplis de haine, combien ils sont intolérants de la coexistence, combien ils sont incapables de révérence vis à vis de la Terre et combien ils sont dénués de respect pour quiconque l’aime et l’adore comme une grande mère animale.
Le tollé, à l’encontre des dangers du culte de la nature, dévoile intégralement ceux qui le profèrent. Par quoi sont-ils effrayés ? A quoi s’opposent-ils vraiment ? Dans une large mesure, leur réaction n’est que pure ignorance : je défie quiconque condamnant catégoriquement le culte de la nature de définir le Paganisme, l’animisme ou le shamanisme. Une telle ignorance est dangereuse, particulièrement lorsqu’elle n’est pas dénoncée et qu’elle induit en erreur des personnes qui seraient autrement réceptives à la vision alternative du culte de la nature (la religion de la déesse, comme on pourrait également l’appeler) en contraste avec le culte d’un dieu paternel extra-terrestre qui sauve la race humaine en lui infligeant un jugement dernier. La controverse concernant Avatar peut, au mieux, inspirer certains individus à s’enquérir de l’essence authentique du Paganisme, du culte de la nature, de la Wicca, de la sorcellerie et du shamanisme tels que ces concepts et pratiques sont appréhendés par ceux qui s’y consacrent.
Un Païen est simplement quelqu’un qui vit dans la nature, dans la campagne, en contact avec les ressources naturelles : en latin paganus. Non pas un citadin qui vit en cage, dans une cellule, au milieu d’étrangers et qui dépend, pour vivre, de ressources et de moyens artificiels et de facture humaine. Tous les peuples Indigènes sont Païens. Considéré comme une religion ou comme une vision du monde, le Paganisme est l’orientation non-institutionnelle, tribale et communautaire de la culture humaine vers le monde non-humain, avec l’intention de préserver un pacte ou une connexion avec les forces plus puissantes de l’environnement afin que la société humaine puisse survivre selon des voies saines et harmonieuses. Le Paganisme n’est ainsi que l’expression culturelle collective de la vision du monde la plus antique, à savoir l’animisme.
La force de vie de la planète Terre est animée et animante et elle confère une expression aux créatures qui sentent qu’elles sont vivantes. L’animisme se définit comme la perception, et non pas la seule croyance, que le monde est vivant. (“Pas à son Image”).
Un animiste est un expert des sciences de la vie impliqué dans l’expérimentation ouverte et open-source de l’activité humaine sur Terre. Pour un animiste, la source de la vie est également la source de la moralité, de la guérison et de la libération des limitations de la condition humaine, c’est à dire la source de la transcendance. Si la source de la transcendance est présente, ici et maintenant, dans le royaume des sens, il n’est nul besoin de la rechercher ailleurs. Les conseillers Jésuites du Vatican en sont certainement fort conscients car ils sont bien versés dans l’anthropologie. C’est pourquoi ils sont à ce point terrifiés de l’attraction du monde Pandorien : l’immersion extatique dans les desseins sublimes et intelligents de la nature est la bénédiction de l’animisme tout autant que la garantie d’accéder au transcendant au travers du monde sensoriel. Cette garantie est habituellement travestie d’un terme philosophique, l’immanence divine. La présence du Divin, dans l’ici et maintenant, est la vision considérée et non pas la croyance aveugle des Païens, des Wiccans et des peuples Indigènes de toutes cultures et de tous temps. Tant qu’une communauté ou une civilisation entière (telles que les civilisations pré-Chrétiennes de l’Europe et du bassin Méditerranéen) jouit d’une telle garantie, vous ne pouvez pas fourguer à ses membres un billet pour la rédemption. Avatar, à divers égards, ravive et conforte cette garantie. La pure beauté du film éveille le spectateur à l’immanence divine.
Les protestations à l’encontre du film, eu égard au culte de la nature, ne peuvent que révéler, de manière on ne peut plus flagrante, la stupidité et les préjugés crasses des Chrétiens piégés dans une série d’aberrations mentales qui se décline comme suit : Païen - embrasseurs d’arbres - sales hippies - sauvagerie indigène - culte de la nature - Satanisme - sadisme - sacrifice humain - orgies - magie noire - blesser et tuer des gens pour le simple plaisir. C’est peut-être une recette grisante de jouissance perverse mais qui est loin de rivaliser avec le bilan de l’Eglise de la Foi Unique.
Que penser d’une religion qui offre un instrument de torture comme un symbole de l’amour divin et qui élève la souffrance au rang de dessein divin : “La victime divine est un reflet pour l’humanité non pas de la solution à notre souffrance, et d’une voie pour la vaincre, mais de notre esclavage total, et consumant, à cette souffrance. La victimisation fonctionne parce qu’elle fait apparaître la force de la souffrance plus puissante que la force de vie elle-même”. (“Pas à son Image”, chapitre 19).
Le monopole du Vatican sur le sadisme, renforcé au travers de la collusion victime-perpétrateur, est, bien sûr, indirectement menacé par la séquence ci-dessus d’associations grotesques. Mais la situation s’avère encore pire pour les Catholiques et les Chrétiens intégristes de tout acabit : si les Païens reprennent la Terre, tout comme les Pandoriens recouvrent leur planète, où vont trouver refuge tous les dévots du dieu paternel extra-terrestre et de son fils sanguinolent, le messie ? Ces dévots vont peut-être devoir faire face à des Païens courroucés les poursuivant de leur magie native. Ils vont peut-être devoir faire face à une intrusion de l’enchantement Gaïen, et de la sorcellerie sophistiquée, dans leur forteresse de foi aveugle. On ne peut que dire - et c’est mon grand privilège et plaisir de le dire - que la revanche, et non pas le pardon, est essentielle au code d’honneur de l’éthique Païenne.
Le Héros Métis
Une de mes réserves, au sujet d’Avatar, concernait la définition de ce terme au sein du contexte précis du film : un avatar est le corps génétiquement conçu qui combine les gènes humains et les gènes Na’vi natifs, à savoir un hybride capable de vivre parmi les natifs Pandoriens comme l’un d’eux. Du moins, sous certaines conditions.
C’est maintenant que le scénario de Cameron s’avère extrêmement intéressant pour moi qui suis un érudit du Gnosticisme. Au début, j’étais préoccupé par le fait que le concept d’hybride puisse n’être qu’un stratagème pour une vie modifiée artificiellement, IA, une Intelligence Artificielle. Ou qu’il puisse promouvoir la notion chic du transhumanisme cybernétique, à savoir la modification des capacités mentales et du génome humains par la science informatique ou l’amélioration génétique/prothésique du corps humain avec des composants artificiels tels qu’ils sont décrits dans certains films, par exemple RoboCop, la série Terminator (également dirigée par Cameron) et AI, l’histoire sentimentale d’un androïde programmé pour l’amour... Comme si l’on pouvait programmer l’amour.
Ceux qui connaissent mon oeuvre écrite savent que je suis fortement opposé à la RV, à la réalité virtuelle, conçue comme supérieure (ou même un substitut adéquat) à la réalité naturelle, sensorielle et enracinée dans la Terre. Cette objection procède de mes études des enseignements Gnostiques qui mettent en garde vis à vis de HAL, la simulation, l’intelligence artificielle. C’est à dire vis à vis du facteur Archontique si clairement décrit dans les textes Gnostiques Coptes.
Cependant, en regardant Avatar, je perçus de suite que Cameron avait satisfait mes standards rigoureux d’invention mythologique sans sombrer dans le délire de l’artificialité et de la simulation. Cela constitue une innovation fantastique. Tel que Cameron a rédigé le script, Jake Sully est un jumeau dont le frère était le sujet originel du programme de croisement de l’avatar. L’ADN de son frère fut combiné avec l’ADN des Na’vi afin de générer l’humanoïde félin, à la peau bleue, et de 3 mètres de haut, qui puisse vivre parmi les Na’vi et respirer l’atmosphère de Pandora, qui est toxique pour les êtres humains. Lorsque son frère meurt, Jake, qui a perdu l’usage de ses jambes dans un combat de Marines, est sollicité pour le remplacer. Son innocence, combinée à une force guerrière brutale et à une familiarité des guerres de tranchée, en font, en fait, un superbe agent pour infiltrer les Na’vi et apprendre leurs voies au bénéfice des prédateurs - telle est du moins sa mission.
Mais Sully devient natif et trahit ses maîtres terrestres, en utilisant la forme même hybride qu’ils lui donnent pour les combattre pour la cause d’Eywa, la puissance maternelle.
Le héros d’Avatar est un jumeau ! O combien fantastique. Mon ouvrage “Twins and the Double” (Jumeaux et le Double) explore la puissance énigmatique de la magie des jumeaux reconnue dans toutes les cultures de la planète. Cameron a utilisé le thème des jumeaux avec une telle finesse qu’il n’est pas tombé dans la déviance du transhumanisme ou de l’artificialité extra-terrestre. J’en suis fort impressionné mais il a fait encore mieux. Beaucoup mieux. Dans certains essais sur ce site, j’ai souligné que la bilocation constitue la sensation la plus excitante au monde. L’expérience de la bilocation est codifiée dans l’image mythologique des jumeaux : être présent physiquement dans deux endroits à la fois et être conscient de ces deux endroits, à savoir agissant dans un endroit tout en étant présent et agissant dans l’autre endroit. La bilocation est un exploit yoguique et une faculté de shamans accomplis, un exploit dont il existe des témoignages vécus. Je me suis bilocalisé à de nombreuses occasions. J’en ai personnellement fait l’expérience mais je ne vous demande pas de me croire.
La bilocation a été attribuée à certains saints Catholiques, notoirement Padre Pio. Les dévots proclament que cet exploit constitue un don exceptionnel et spectaculaire de Dieu, réservé aux Saints avec l’approbation du Vatican, mais ce phénomène est beaucoup plus répandu dans les cultures shamaniques. La projection astrale est une forme atténuée de la bilocation authentique, qui constitue une forme extrême. Les expériences proches de la mort témoignent d’un type de bilocation durant laquelle les individus perçoivent, sur un lit d’hôpital, leur corps étendu et présumé mort mais ils ne perçoivent pas nécessairement l’autre corps qui observe la personne mourante. Cependant, dans certaines expériences proches de la mort, les gens vagabondent dans leur double et puis retournent ensuite à la vie. Les participants des Mystères Eleusiens témoignèrent de cette expérience de demeurer dans un second corps dans les champs Eleusiens, en comparant l’initiation à la mort - mais, heureusement, une mort à laquelle vous pouvez survivre.
Image suggérée de bilocation telle qu'elle se
manifeste dans la projection astrale, dans les expériences
hors du corps et dans les expériences proches
de la mort qui sont universellement attestées.
La bilocation réelle, la présence simultanée
et active dans deux corps constitue la forme
extrême de ce phénomène. L'expérience
de Jake Sully dans son double avatarique
s'en rapproche considérablement. La bilocation est une forme de gémellation. Jake Sully est un jumeau à deux égards. Il possède un frère jumeau et il possède un jumeau avatarique, son propre hybride. Sully doit pénétrer dans une sorte de caisson d’isolation sensorielle et s’endormir afin que sa conscience soit téléportée sur Pandora où son hybride est éveillé et actif. Il doit pénétrer dans une sorte de transe shamanique afin de vivre et d’agir dans son identité avatarique sur Pandora. Que Cameron en ait été conscient ou non, cet élément du scénario n’est pas de son invention : les traditions planétaires du shamanisme témoignent de la faculté du shaman d’entrer en transe, de tomber à terre dans un état de stupeur. Cela est appelé un transport extatique. Ensuite, dans son corps de rêve, ou dans son double plasmatique, le shaman explore d’autres mondes ou peut apparaître comme une personne normale dans ce monde tout en étant physiquement séparé de l’endroit où son corps gît en transe.
On pourrait appeler ce processus “transe-portation par gémellation” et il évoque les bouffonneries de mondes dissociés de la trilogie Matrix. Mais il existe une différence fondamentale entre Neo se téléportant dans la Matrice et Jake qui se bilocalise sur Pandora. La Matrice est un monde simulé, une zone de réalité virtuelle entretenue par des programmes informatiques qui projettent des champs immenses de couleurs, de goûts, de sons, etc, qui sont simulés (à savoir contrefaits). Ce n’est pas le monde réel sensoriel de la planète Terre mais la Terre conçue comme une “planète-prison”, un terme utilisé par l’alarmiste Alex Jones d’InfoWar.com. Jones semble être un Chrétien qui méprise “la religion de Gaïa” et condamne Avatar comme de la propagande du Nouvel Ordre Mondial qui fait, de nous tous, des avatars dans les stratagèmes des Illuminati. Alex Jones, l’alarmiste, serait peut-être alarmé d’apprendre que le concept de planète-prison trouve son origine chez les initiés Païens des Mystères qui comparèrent le système solaire à une prison gérée par les Archontes, des cyborgs extra-terrestres. Cette métaphore mythologique décrit la situation de l’humanité esclave de ses propres projections et concepts mentaux, à savoir esclave d’une mentalité extra-terrestre opérant au sein de son propre mental et qui ne peut pas être imputée à des facteurs extérieurs bien qu’elle puisse être activée et affectée par des influences extérieures.
Identité Avatarique
Revenons maintenant au point principal : la gémellation est un mythème qui guide le scénario d’Avatar de manière ingénieuse. L’expérimentation d’hybridation avatarique est une métaphore cinématographique brillante du shamanisme. A l’image des shamans au travers des âges, Sully entre en transe afin qu’il puisse agir dans son double, son soi jumeau. L’astuce, dans ce cas, est que son soi double a été construit artificiellement - cependant, c’est authentiquement le même véhicule qu’un shaman utiliserait pour explorer la dimension surnaturelle de ce monde ou pour s’aventurer dans d’autres mondes. Ceux qui l’ont expérimentée (dont moi-même) peuvent témoigner que la bilocation est un phénomène authentique et non pas une fantaisie. C’est un phénomène tout autant réel que de vivre et de se mouvoir dans ce monde ordinaire.
L’avatar de Jake vit et agit réellement parmi les Na’Vi sur Pandora, tout au contraire de Neo qui pénètre dans un monde fantomatique lorsqu’il est branché sur des instruments archaïques et lorsqu'il est téléchargé dans la Matrice. La Trilogie Matrix est une assez bonne métaphore pour la planète-prison des initiés Gnostiques mais cela ne monte pas à la cheville de la gémellation shamanique et mythologique dans Avatar.
Dans son acception la plus antique, le terme avatar dérive d’un verbe Sanskrit signifiant “descendre”. Dans le mythe Hindou, un avatar est un être divin qui descend dans une forme humaine afin d’intervenir dans l’histoire. Ce n’est pas un messie de type Christique qui meurt pour sauver le monde ou qui proclame le jugement divin mais un secouriste, tel un maître-nageur sur une plage. (La forme de l’avatar dans la religion Hindoue est une forme phantasmatique, ou docétique dans le langage Gnostique : une apparition. Mais, de toutes manières, l’entièreté du monde est une apparition dans la vision Hindoue !). Il existe dix avatars de Vishnu, le dieu dormant de la religion Hindoue. Alors que Vishnu rêve le monde au cours d’immenses périodes de temps, la divinité pénètre périodiquement dans les situations qu’elle est en train de rêver, adoptant un corps et une personnalité humaines ou bien des formes animales telles que la tortue ou le lion. Le neuvième avatar de Vishnu était connu pour avoir emprunté une forme humaine : Lord Krishna, un roi-philosophe Hindou qui mourut en 3102 avant EC. Le dixième ou prochain avatar de Vishnu est appelé Kalki, dépeint comme un cheval blanc, parfois avec un guerrier archer le chevauchant. (Je crois que les lions blancs de Timbavati peuvent être une manifestation de cette expression avatarique).
Jake Sully, dans son corps de Na’vi, n’est pas un avatar qui descend d’un monde supérieur - non, son destin est plus merveilleux que cela. Il est l’incarnation de lui-même libéré dans un monde présent aux dimensions magiques. A de nombreux égards, et à l’apogée de sa magnificence dans cet élément du scénario, le film de Cameron transcende les structures métaphoriques même qu’il utilise.
L’avatar d’Avatar n’est pas un personnage messianique. Loin s’en faut. Ici, de nouveau, Cameron fait un usage impeccable des précédents mythologiques et shamaniques. Jake Sully est un héros au service de la Terre Mère planétaire, Eywa - Gaïa, sous un autre nom. Il n’est pas un personnage messianique mâle et blanc ainsi que certaines recensions hostiles l’ont affirmé. Dans mon ouvrage “Pas à son Image”, je démontre que le profil du messie dans la foi rédemptionniste est clair et net; il est constitué des éléments suivants : il est d’origine suprahumaine, il est envoyé en mission par le dieu paternel, sa souffrance rachète le monde, il préside au jugement dernier, sa mort est une nécessité pour sauver l’humanité, il est miraculeusement ressuscité par dieu et non pas par les humains qu’il vient sauver. Sur la base du dernier point plus particulièrement, le héros d’Avatar n’est nullement un messie :
Sully meurt sous sa forme humaine et s’éveille en Na’vi après avoir combattu au côté des natifs, dans leur bataille contre les prédateurs. Sa résurrection résulte du rituel tribal et de l’empathie du peuple vénérant la déesse : ce n’est pas le fait d’un dieu paternel extra-terrestre. Le messie salvationniste n’est jamais quelqu’un du peuple, il n’est jamais un simple membre de la tribu humaine.
Pouvoirs Animaux
En contraste avec le messie typique qui est adombré par une puissance supra-terrestre et qui agit sous l’égide de cette puissance, l’avatar de Jake dépend d’une connexion intime avec un pouvoir animal, le grand oiseau prédateur Turuk. Chaque guerrier de Pandora possède un akran, un double surnaturel ou nahual. Ce thème est purement shamanique et éternel dans l’héritage spirituel et magique de notre espèce. Dans la sphère de l’animisme, les individus humains possèdent des affinités particulières avec certains animaux. Ils peuvent invoquer ces animaux, les rencontrer dans la nature, ou se métamorphoser en eux. Au fil des temps, les cultures animistes se sont souvent transformées en sociétés guerrières, qui doivent être rigoureusement différenciées des sociétés paternelles urbaines. Dans les sociétés guerrières, la figure de la déesse est centrale et les pouvoirs animaux sont révérés en tant que ses attributs et projections. La culture des Na’vi est tout simplement une telle société de chasseurs-guerriers qui témoignent de la révérence pour les pouvoirs animaux ainsi que Jake l’apprend lorsque les Na’vi lui enseignent comment tuer avec révérence et comment être reconnaissant vis à vis de la proie. La leçon de la connexion proie-prédateur figure avec force dans les scènes finales du film. L’invocation des pouvoirs animaux joue également un rôle décisif dans la conclusion de ce film.
Cameron reprend de nombreux thèmes mythologiques et shamaniques avec une précision exceptionnelle. Ceci est extrêmement peu commun selon les standards Hollywoodiens. Je ne sais pas qui il a consulté quant à la mythologie qui est incorporée dans l’histoire et l’imagerie de son chef d’oeuvre... Il a peut-être un conseiller et guide secret. Il affirme avoir eu la vision, de tout le film, dans un rêve lors d’une phase antérieure de sa vie. Tel un “terma”, un trésor de sagesse, cette vision lui fut conférée intégralement en une seule fois. Une telle expérience est caractéristique des “tertons”, les découvreurs de trésors dans la tradition Tibétaine, et des musiciens prodiges tels que Mozart et Scriabine qui affirment avoir entendu leurs immenses compositions en l’espace d’une seconde. L’écrivain Français Balzac déclara avoir eu aussi un moment de “conscience cosmique” durant lequel il perçut l’entièreté du scénario et des personnages (environ 242) de l’ensemble de son oeuvre “La Comédie Humaine”.
Le monde de la science fournit des exemples similaires. Kekulé perçut la structure en anneau du carbone durant une vision hypnagogique précédant le sommeil. Einstein conçut la théorie de la relativité dans un éclair d’intuition induit par la visualisation d’un homme surfant sur un rayon de lumière. Dans certains cas, lorsque les scientifiques l’admettent, nous apprenons que leurs découvertes émergèrent lors d’états de conscience accrue induits par des substances psychoactives tel que le LSD. Bien qu’il n’acceptât pas que cela fût divulgué de son vivant, Sir Francis Crick, le co-découvreur de la structure de l’ADN avec James Watson, eut la vision de la double-hélice dans un état altéré de conscience induit par le LSD. Les scientifiques qui accompagnèrent Jeremy Narby au Pérou, pour des rituels de transe avec l’ayahuasca, déclarèrent qu’ils étaient capables de percevoir le niveau biomoléculaire de la nature directement et de comprendre et faire progresser leur pensée scientifique grâce à l’impulsion générée par le mélange des deux plantes sacrées.
Ce n’est pas mon propos de suggérer que Cameron ait été, de quelque manière que ce fût, influencé par des plantes psychoactives lors de sa conception et de sa réalisation d’Avatar mais le film lui-même peut induire cette sorte d’influence chez les spectateurs. Quiconque a contemplé la splendeur exquise de Gaïa, intense, palpitante, miraculeusement conçue, vivante dans le moindre détail et conviant au panorama de sensations qui jaillissent extatiquement dans le corps, comme l’éruption de l’océan au travers des pores des récifs de coraux - quiconque a vécu cette expérience en direct témoignera, je le crois, pour ceux qui ne l’ont jamais expérimenté, que la splendeur esthétique pure de ce film évoque la vision bénie d’Elysium, le Paradis Terrestre. Non pas la vision d’un monde extra-terrestre mais la vision ultime de ce monde présent. Oui, c’est réellement ce qui est perçu ici dans le monde naturel. Assurément. O combien !
L'habitat de Pandora avec des arbres gigantesques comme en Amazonie
Le fait que Cameron et son équipe délivrent cette vision de la nature en ayant recours aux techniques les plus sophistiquées de la virtualité et de la simulation, à savoir la CGI, l’imagerie générée par ordinateur, est une réelle innovation en soi. Je ne veux pas parler d’une innovation technologique, mais d'une innovation de perception. Dans les fables de sorcellerie de Castaneda, Don Juan définit la pratique du guerrier mystique comme une percée au travers des paramètres figés de la perception. Il est certain que c’est ce que Cameron réalise grâce aux effets spéciaux de son film. J’ajouterais que seul un artiste qui a déjà une vision authentique à délivrer peut avoir recours à la CGI avec une telle maîtrise spectaculaire. La CGI en soi ne peut pas générer une telle vision. Tant bien même il est fait recours à la technique de la simulation pour dépeindre Pandora, la beauté étonnante de l’animation de ce film montre comment la planète, sur laquelle nous demeurons, apparaît au regard Edénique de notre innocence passée et future.
La Magie qui Tue
Lors d’un moment critique du film, l’avatar de Jake va vers l’arbre sacré d’Eywa afin de requérir de l’aide dans l’usage des arcs et des flèches pour vaincre une gigantesque armada de flotte aérienne militaire et high-tech. Mais Neytiri lui dit avec tendresse que “La grande mère n’intervient pas dans nos affaires, Jake, elle ne fait que protéger l’équilibre de la vie”.
Les Païens observent et vénèrent l’harmonie de la vie. L’équilibre entre l’ordinaire et le sublime fait partie intégrante de cette harmonie. Le mysticisme expérimental, qui est en accord avec les traditions shamaniques de la plus lointaine antiquité, révèle que la puissance surnaturelle est présente dans le monde naturel, dans l’ici et le maintenant. La sublimité de la beauté de Gaïa est en soi une force surnaturelle. Entrer dans cette beauté et la laisser nous consumer extatiquement, tremblant dans nos cellules et chancelant sous son impact, comme un marin saoul sur le pont de son bateau durant un ouragan - cette pénétration, corporelle et immédiate, est telle que celui ou celle qui s’adonne à la contemplation appartient à cette beauté et aspire à rester pour toujours dans cette beauté ou, sinon, de ne vivre qu'une vie diminuée, auto-réprimée, étroite et creuse. A la suite d’une rencontre biomystique authentique avec la Terre Mère, vous ne vous appartenez plus exclusivement. Et au sein de cette rencontre, la beauté commence à vous faire sienne.
Mais le Christianisme et les autres credos salvationnistes dénient et rejettent la beauté divine de ce monde. Ils affirment que la nature et les impulsions naturelles relèvent du péché et ne méritent que le châtiment. Ils mettent en exergue l’autorité d’une source supranaturelle au-delà de la Terre et de l’humanité. Ils distribuent les châtiments et les récompenses dans le mépris le plus total des mérites. Afin d’imposer leur croyances pseudo-magiques, paranoïaques et perverses, ils déploient des efforts gigantesques pour détruire la magie authentique partout où elle émerge sur cette planète : sur la terre et dans les arbres, dans l’eau et dans les cieux, dans les plantes et chez les animaux, chez les enfants et chez les êtres humains à l'innocence authentique et à l’imagination éveillée.
L’Histoire est la somme des archives de l’éradication de la magie, de l'annihilation des talents surnaturels conférés par Gaïa à sa progéniture privilégié à problèmes, la race humaine, pour ne pas dire de l’extermination de la race elle-même. En cette période ultime dans le cycle des âges, on est en droit de se poser la question suivante : où se trouve la contremagie dans cette histoire horrible d’auto-annihilation ?
Je ne sais pas d’où Cameron tire sa mythologie et s'il a eu besoin de conseils - ou s’il les a suivis - d’une personne de mes capacités. Dans ma rubrique, Dyna-Mythes, j’expose ma conception selon laquelle Joseph Campbell, le célèbre érudit en mythologie comparée, a très mal conseillé Spielberg et Lucas eu égard au scénario de Star Wars. Il leur donna le drame du dualisme Perse, le combat entre la Lumière et les Ténèbres - ce qui est une impasse. Ce qu'il aurait du leur donner alors, à mon avis, c’est un mythe Gaïen telle que la vision Sophianique des Mystères. Le film de Cameron résonne avec cette vision, à bien des égards, mais sa force essentielle réside dans la mythologie pure du chasseur shamanique de la préhistoire.
L’héroïne Neytiri évoque à l’esprit l’archer nubile Néolithique de la grotte du Shaggy Bear en Andalousie, près de là où je vis. C’est l’image parfaite d'Artémis, la chasseresse chaste et insaisissable du mythe Grec. Elle est réputée pour avoir fait dévorer un vieil homme nommé Actéon par ses chiens de chasse lorsqu’il la vit se baignant nue à la lumière de la lune et qu’il eut du désir pour ses formes magnifiques. Cependant, un mythe plus ancien révèle la dimension et le dessein authentiques de la nature vengeresse de la chasseresse : lorsque le chasseur d’Orion excéda le quota d’animaux de proie établi pour lui par la Terre Mère, Artémis envoya un scorpion géant pour le piquer à mort. (Cette version de “la revanche de Gaïa” ne fut pas écrite par James Lovelock).
Neytiri est l’Artémis vengeresse de Pandora dépeinte dans la Cueva de la Pileta. Elle n’est, cependant, en aucune manière une figure du passé lointain. Dépeinte imaginativement dans un film, elle va peut être arriver pour cheminer dans le monde en chair et en os. Hollywood est souvent un oracle annonciateur de l’inconscient collectif. Neytiri incarne la magie tueuse capable de restaurer l’équilibre moral dans le monde, et qui est comparable à la faculté d’une nymphe néolithique de chasser à mort et de monter à cheval. Avatar convie ce message extrêmement anti-Chrétien aux natifs de la Terre : la chasse aux prédateurs est ouverte. Neytiri abat le commandant militaire vieillissant, dans sa carapace-armure balèze de RoboCop, de deux flèches dans la poitrine : l’une pour la mort et l’autre pour ne pas témoigner la révérence qui est due à Eywa, la Déesse de la Terre. Nous avons ici une démonstration de la magie tueuse de l’élimination et de la revanche, une magie double et moralement équilibrée.
Dans la riche mythologie du Divin Féminin, Kali est une dénomination du courroux de la Déesse mais également de l’outrage des êtres humains qui se regroupent afin de protéger tout ce que la Déesse leur donne, tout autant pour le plaisir que pour la survie. Imaginez la colère d’une mère lionne protégeant ses petits, la prunelle de ses yeux, mais magnifiée à l’échelle de toute la race féline. Imaginez cette émotion féroce qui s’éveille dans les coeurs humains et qui se répand dans la société comme une force empathique afin d’unir les gens, en dépit de leurs différences et de leurs divisions. Imaginez que la rage divine, et non pas l’amour, unisse l’humanité dans le désir transcendant d’une coexistence paisible et même ludique. Si cela arrivait, l’espèce humaine serait reconnectée instantanément avec toute la vie sensible dans le jaillissement interactif d’une force invincible, la vague de fond de l’aura émotionnelle de Gaïa.
Dans Avatar, au moment où les Na’vi semblent avoir irrémédiablement perdu la bataille, Eywa libère les pouvoirs animaux afin de lutter avec eux contre les pillards militaro-industriels. Elle intervient pour protéger l’équilibre de la vie.
Mais les humains sont également des animaux de pouvoir dans le couvain surnaturel de la Terre Mère. Le courroux de l’animal humain à l’encontre de la prédation par ceux de sa propre espèce implique la magie noire supérieure de Kali, la protectrice suprême des guerriers Gaïens.
Avec l’adoration de la Mère Nature vient la volonté féroce de protéger et de préserver Ses Voies. Non pas juste notre vie d’humains qui s’auto-définissent, mais le réseau de tout ce qui est vivant. Avatar inspire la révérence pour la Terre par la beauté de son imagerie cinématographique et il fait même encore plus car c’est une authentique éco-allégorie, une histoire éternelle avec une morale pour notre époque. Nous sommes des Na’vi. Dans l’équilibre des bilans de Gaïa, alors que la survie humaine est maintenant en jeu, la voie vers la beauté planétaire est également la voie du guerrier qui reprend la planète. Avatar nous guide sur cette voie.
John Lash - Andalousie, le 3 février 2010.