Les bactériophagesVendredi, 21 Août 2009 21:07
L'avenir de la lutte anti-microbienne
Le nom de Félix Hubert d’Hérelle, virologiste né au Québec en 1873, est indissociable de la découverte des bactériophages. Entre 1917 et 1965, plus de 11 000 articles ou livres sur les bactériophages, appelés aussi « phages » ou « virus bactériens », ont été publiés. On ne sait combien il y en eut par la suite, leur nombre n’ayant pas été recensé. La base de données de l'Université Laval au Québec comprend environ 4 500 bactériophages examinés au microscope électronique.
Les virus sont divisés en cinq grands groupes : les virus des vertébrés, des invertébrés, des plantes, des bactéries et des protistes eucaryotes (champignons, algues, protozoaires). D’Hérelle a donc découvert le groupe des virus des bactéries (ou bactériophages).
Un peu d'histoire :
En 1915, à l’Institut Pasteur de Paris, d’Hérelle étudie les cultures bactériennes des recrues militaires victimes d’une épidémie de dysenterie. Il remarque que les cultures sont détruites par un agent inconnu, invisible et passant à travers les filtres destinés à retenir les bactéries. Or, cet agent signe la guérison des malades. Il fondera un "Laboratoire du Bactériophage" à Paris (1933) avec pour objet la production des phages thérapeutiques.
En 1934, d’Hérelle se rend en Russie sur invitation de son disciple G. Eliava pour y fonder des instituts de recherche sur les bactériophages à Tbilisi (actuelle Géorgie), Kiev et Kharkov. Pendant l’occupation allemande, D’Hérelle est interné et il écrit ses mémoires qui ne seront pas publiés. Il meurt en 1949, et malgré l’importance de ces découvertes, d’Hérelle est resté méconnu.
Tandis que le monde occidental a "oublié" la phagothérapie, l’institut de Tbilisi fabrique, derrière le rideau de fer - à l’insu du monde occidental, des "phages thérapeutiques" depuis plus de 60 ans. Il s’agit surtout de phages de Pseudomonas, E. coli, Proteus, Staphylococcus, Streptococcus, Enterococcus, Klebsiella et Acinetobacter, scellés en ampoules et administrés par voie orale ou par vaporisation.
Jusqu’au démembrement de l’URSS, la fabrication des phages sera considérable et le nombre d’employés atteindra le chiffre de 1200. Depuis l’indépendance de la Géorgie, l’institut a perdu ses marchés et ne travaille que pour les besoins locaux. Mais plusieurs instituts américains, confrontés aux résistances bactériennes, ont redécouvert l'intérêt des phages, notamment contre les bacilles de Koch et de Hansen.
Les prochaines années seront donc sans doute celles du déclin de l'antibiothérapie de large spectre (les souches bactériennes multirésistantes aux antibiotiques se multipliant) au profit de bactériophages spécifiques.
Cas clinique : A la fin de 2004, une femme de 54 ans, atteinte d'une dilatation des bronches, a été vue pour une intervention sur la hanche. Elle était atteinte d'une surinfection pulmonaire chronique par une souche de Pseudomonas aeruginosa résistante à presque tous les antibiotiques. A la demande de la patiente, elle-même médecin, il fut recherché un bactériophage dans les eaux d'égout de l'hopital. Après culture et purification, l'extrait fut donné en aérosol deux jours de suite ... La chirurgie fut réalisé avec succès deux mois après.
Bibliographie des bactériophages :
D’Hérelle F. «The Bacteriophage and its Behavior » (Williams & Wilkins, Baltimore, 1926).
DUBLANCHET Alain « Des virus pour combattre les infections, la phagothérapie : renouveau d’un traitement au secours des antibiotiques » (Favre, 2009)
Centre de référence « Félix d’Hérelle » pour virus bactériens : Département de biologie médicale, Faculté de médecine, Université Laval, Québec, QC, G1K 7P4 (Canada)
source : site : medecine intégrée