Doté d’un cerveau composé de deux hémisphères, chacun de nous appréhende la réalité de manières très différentes. Et pour cause : notre cerveau gauche est spécialisé dans l’analyse et les raisonnements logiques, il décrypte le monde dans ses moindres détails.
Notre cerveau droit, de son côté, est capable de percevoir l’information d’une manière métaphorique et analogique, il crée des liens et développe une pensée intuitive et globale. Si le cerveau gauche était un mathématicien, le droit serait un poète. Raison ou intuition ? Analyse détaillée ou vision d’ensemble ? La réponse à cette question est souvent un choix culturel.
Psycho-neuro-endocrino-immunologieLa pensée occidentale s’est construite sur les bases logiques du cerveau gauche. Dès lors, la science moderne découpe l’être humain en d’infimes parties. D’un côté il y a le corps, de l’autre, il y a l’esprit.
Néanmoins, à force d’observer des détails, le réductionnisme scientifique perd la vision de l’ensemble. Or « la vie ne réside pas dans les molécules mais dans les relations qui s’établissent entre elles », faisait remarquer Linus Pauling, lauréat des prix Nobel de chimie et de la paix.
C’est ainsi qu’une nouvelle approche tente de réconcilier les différentes parties de l’humain. Baptisée psycho-neuro-endocrino- immunologie, celle-ci étudie les liens qui existent entre les pensées (bonnes ou mauvaises), les émotions (positives ou conflictuelles), l’activation du système nerveux (détente ou stress), la production des hormones et la qualité des défenses immunitaires de l’organisme.
La théorie de l’informationLa science est donc en train de redécouvrir la nature des liens vitaux qui unissent le corps et l’esprit. « Chacun de nous est au centre d’un réseau de corrélations », disait Ilya Prigogine. L’information qui circule dans ce réseau est un élément essentiel pour la compréhension de notre nature humaine.
Or, à travers nous, l’information se manifeste, tour à tour, sous la forme de nos pensées, des émotions ressenties dans notre corps, de nos comportements ou des réactions biologiques de notre organisme. Elle est à la fois idée et matière, matière et énergie, énergie et action. Elle est le lien entre les différents états de notre existence.
Apparemment très éloignées, les théories millénaires de l’Inde et les connaissances modernes de la science occidentale ont davantage de points communs qu’on ne l’imagine.
Une question d'énergieDepuis des millénaires, les sages et les yogis de l’Inde explorent les multiples dimensions (spirituelle, intellectuelle,émotionnelle et physique) de l’être humain.
Privés des moyens d’analyse sophistiqués de la science moderne, ils ont échafaudé leurs théories à partir de leurs expériences et de leurs observations. Au lieu de se fier à leur cerveau gauche, ils ont fait appel à l’intuition de leur cerveau droit.
Leur vision est donc restée plus globale. Et le concept de l’information-lien entre le corps et l’esprit a été remplacé par celui de l’énergie – energeia : la « force en action » des anciens Grecs. Véritable « souffle de vie », la métaphore est commune à de nombreuses cultures pré-scientifiques : ankh chez les Égyptiens, pneuma chez les Grecs, qi chez les Chinois, prana chez les Indiens.
Il ne s’agit pas de l’une des formes d’énergie (électrique, électromagnétique, nucléaire, calorique ou mécanique) mesurées par la science occidentale. Le prana représente plutôt le continuum entre la matière et la pensée. Ses manifestations sont multiples, tantôt physiques, tantôt psychiques.
L’anatomie des chakras Réparti entre deux « canaux énergétiques » (l’un passif : Ida; l’autre actif : Pingala), le prana des Indiens est soumis aux mêmes polarités que l’influx nerveux au sein des systèmes parasympathique (détente) et sympathique (stress) décrits par la neurologie.
L’analogie est troublante.
De plus, chaque « centre énergétique» ou chakra correspond à un plexus nerveux précis et est connecté à une glande endocrine spécifique.
Si l’on observe les effets des hormones produites sous l’effet d’un chakra particulier, on constate que ceux-ci sont en rapport avec le rôle physique, émotionnel ou spirituel attribué à ce chakra.
Ainsi, par exemple, le premier chakra, situé entre les jambes, censé nous relier à la dimension matérielle de l’existence, commande les glandes surrénales qui sécrètent l’adrénaline et le cortisol, les deux hormones qui nous permettent de survivre.
le second chakra, qui est rattaché à la vie émotionnelle et à la créativité, stimule les ovaires ou les testicules dont les hormones influencent nos humeurs et nous permettent de procréer.
le troisième chakra, en liaison avec l’intellect et la définition de l’ego, régit l’activité des hormones digestives qui participent à l’assimilation de ce qui nous fabrique.
La démonstration peut ainsi être poursuivie pour les sept centres énergétiques de la tradition indienne.
La preuve, sans doute, que, malgré leurs perceptions différentes, notre cerveau droit et notre cerveau gauche décrivent la même réalité.
_Thierry Janssen est médecin, chirurgien et psychothérapeute. Son dernier livre, La Solution intérieure.
Vers une nouvelle médecine du corps et de l’esprit vient de paraître aux éditions Fayard